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    jeudi 21 septembre 2017

    Protection des culture/Cochenille du cactus

    Cochenille du cactus: La recherche agronomique intensifiée


    Par Jamal Eddine HERRADISOURCE 


    Un plan d’urgence mis en place


    L’espèce du ravageur déterminée par l’INRA

    Un nouveau prédateur et un biopesticide donnent des résultats encourageants


    Depuis son apparition il y a une année à Sidi Bennour, la cochenille du cactus a engendré des dégâts énormes dans plusieurs plantations dans différentes régions du pays (cf. www.leconomiste.com). Les attaques de ce redoutable ravageur sont rapides et imprévisibles, et par conséquent, la destruction d’importantes superficies plantées en cactus connaît une extension fulgurante et dangereuse dans plusieurs bassins de production au Maroc. C’est le cas notamment dans les Doukkala et Rhamna où plus de 50.000 hectares ont été totalement ou partiellement détruits. Les pertes socioéconomiques et environnementales sont énormes.

    Pour empêcher la dissémination de ce ravageur, le ministère de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, a mis en place un plan d’urgence d’envergure pour lutter contre la cochenille du cactus. Parallèlement à des actions de traitements chimiques, d’arrachage et d’enfouissement des plants de cactus totalement infestés, un programme de recherche a été lancé par l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) en partenariat avec le Centre international de recherche agricole dans les zones arides (ICARDA).
    Les axes retenus par ce programme concernent d’abord l’étude de la biologie et l’écologie de l’insecte et de ses ennemis naturels et la proposition d’alternatives de lutte biologique. S’ajoute, ensuite, l’identification des biopesticides d’origine végétale ou microbienne contre ce ravageur. Il fallait également cartographier et géolocaliser l’évolution et l’agressivité de ce ravageur dans les zones de production de cactus à travers le Maroc. Et, enfin, étudier les collections nationales (INRA) et internationales du cactus pour identifier des variétés ou clones résistants et/ou tolérants à cette cochenille.
    Depuis le lancement de ce programme en juillet 2016, des réalisations originales et très prometteuses ont été enregistrées (cf. www.leconomiste.com). En effet, l’espèce de ce ravageur a été déterminée dans le laboratoire d’entomologie de l’INRA à Agadir. C’est ce qui a permis à l’équipe de chercheurs INRA-ICARDA de lancer d’importants travaux consacrés à la lutte intégrée contre la cochenille du cactus.
    Concernant l’aspect d’identification de biopesticides, trois produits ont montré en laboratoire une efficacité intéressante contre ce ravageur. Des évaluations physiologiques et biochimiques sont en cours pour éclaircir les différents aspects liés à l’application au champ et plus particulièrement la phytotoxicité et la réduction du coût, notamment pour le biopesticide à base d’essence d’orange qui a donné les meilleurs résultats. Il en est de même de l’utilisation d’un nouveau prédateur sur cette culture. Il s’agit d’une coccinelle prédatrice qui a montré une importante voracité à l’encontre de la cochenille. Cette coccinelle et ses larves consomment la femelle et les nymphes du redoutable ravageur.
    Pour l’aspect du suivi de l’évolution et de l’agressivité de la cochenille du cactus, des prospections, échelonnées dans le temps (2016-2017), ont été réalisées dans les régions à cactus. Les données relevées lors des sorties des chercheurs sont en cours d’analyse en vue de produire une carte avec des données sur la dissémination et les degrés d’infestation de cette cochenille sur le cactus à travers le pays.
    Enfin, l’exploit le plus encourageant et le plus durable pour la filière cactus est certainement celui qui a été réalisé par l’équipe de recherche en un temps record (moins d’une année). Il s’agit de l’identification des écotypes de cactus résistants à cette cochenille à travers des essais d’évaluation au champ. En effet, une copie de la collection nationale du cactus de l’INRA a été plantée en août 2016 chez un agriculteur dans la région très infestée de Sidi Bennour. Le suivi du phénomène des infestations naturelles, mais aussi celles artificiellement provoquées  par l’équipe de chercheurs, a permis d’identifier pas moins de 6 écotypes de cactus avec une résistance totale à cette cochenille.
    Par la suite, trois copies de cette collection ont été installées à Zemamra, au Domaine expérimental de l’INRA, sous des ombrières pour pousser le criblage et la sélection. Ensuite, une copie a été plantée dans la région de l’Oriental pour l’évaluation agronomique et la résistance naturelle.
    Face à ces résultats, les équipes de recherche avancent que tous les espoirs sont permis. Et que la fin de la cochenille du cactus est pour bientôt. Avant même la fin de l’année, assurent-elles.


    Multiplier les écotypes
    Le ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, Aziz Akhannouch, a donné des instructions fermes pour intensifier davantage la recherche et procéder rapidement à la multiplication des écotypes identifiés résistants à ce ravageur. Depuis, 2.500 plants sont mis en culture sous ombrières et, une fois développés, ils seront plantés pour constituer un parc à bois, capable de fournir du matériel végétal de cactus résistant et authentique à des pépiniéristes conventionnés avec l’INRA. Ainsi, les plants de cactus multipliés par les pépiniéristes serviront les projets de plantations régionaux du Pilier II du plan Maroc Vert.
                                                                  
    «Promu» au rang de filière importante
    Très répandu dans de multiples régions du monde à climat aride et semi-aride, le cactus (Opuntia sp), communément appelé figue de Barbarie, est également présent en plusieurs espèces au Maroc. Celles-ci produisent des fruits exotiques très prisés, mais l’espèce Opuntia ficus-indica est la plus cultivée pour la production de fruits comestibles.
    Au Maroc, la culture du cactus est présente sur l’ensemble du territoire à différents degrés. Elle est plus concentrée dans les régions des Rhamna, Marrakech, Sidi Ifni, Al Hoceïma, Doukkala, Tadla et Chaouia. Le cactus produit des fruits comestibles pour l’alimentation humaine et du fourrage pour le bétail. S’adaptant parfaitement à la sécheresse, sa culture contribue à la lutte contre la désertification en protégeant les sols contre l’érosion.
    Et aussi à la conservation de la biodiversité des espèces végétales favorisée par un microclimat adéquat au développement d’une faune et d’une flore très diversifiées. En outre, cette culture génère des revenus conséquents pour le monde rural par la valorisation des fruits, de ses déchets et la fabrication de produits à haute valeur commerciale (cosmétique et thérapeutique…).
    Bien que le cactus soit très apprécié par les populations rurales, sa culture est restée limitée jusqu’à l’avènement du plan Maroc Vert. Le cactus a, ainsi, été «promu» au rang d’une importante filière avec des projections régionales dans le cadre du Pilier II de ce plan. Un effort considérable de soutien à la plantation et à la valorisation du cactus a été déployé par le département de l’Agriculture dans les régions propices à cette culture.

    Objectif: atteindre une superficie de 160.000 ha à l’horizon 2020. Pari déjà gagné ou presque. Car, malheureusement, la pérennité de cet écosystème extrêmement résilient est gravement menacée par une cochenille ravageuse, invasive et dévastatrice du cactus.

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